Littérature (nouvelle série) n° 1, mars 1922
DIRECTEURS :
ANDRÉ BRETON & PHILIPPE SOUPAULT
= Rédaction : 37, Avenue Duquesne, PARIS (VIIe) =
Administration : AU SANS PAREIL, 37, Avenue Kléber, PARIS (XVIe)
LITTÉRATURE paraît le 1er de chaque mois
HORS-TEXTE : Le Cerveau de l'Enfant, par G. de Chirico.
PRIX DU NUMÉRO
France : 2 francs -:- Étranger : 2 fr. 50
ABONNEMENTS
Les 12 numéros : 20 franc ; pour la France et 25 francs pour l'Étranger
La Collection de première série de LITTÉRATURE comprend 20 numéros dont plusieurs sont épuisés et se vend 40 francs
P. 1
ENQUETE
Fatiguée de la manière dont sont menées les enquêtes littéraires et déplorant que cet excellent mode d'information ne serve plus à renseigner que sur des points littéraires d'une importance dérisoire, Littérature, dont on n'a pas oublié l'enquête : " Pourquoi écrivez-vous ? ", s'efforce, pour marquer les tendances de sa reparution, de s'introduire plus avant dans la conscience obscure de ses lecteurs et leur pose à tous cette simple question :
Que faites=vous lorsque vous êtes seul ?
Les réponses devront être adressées à la rédaction, 37, avenue Duquesne, Paris (VIIe). Elles paraîtront par ordre de réception dans les prochains numéros de Littérature.
P. 2
Le Quatrième Danseur
Comme il dansait dans son pantalon
un œuf sortit de la cuisine
à pas lents
comme une étoile un photographe
jusqu'au lendemain il sortit
jusqu'au lendemain il dansa
avec un collier
avec une musette
et la barbe lui poussa
tout au long de son pantalon
tout autour de la cuisine autour de la cuisine
qui n'est peut-être pas née
Ma Main dans la Bière
Le pendu est un pirate
qui avait des dents
qui avait des os
qui avait des os
avec de l'eau dedans
Puis il courut comme un serpent
sa mâchoire se détendit
sa langue monta sur son œil
Alors les sauterelles et les oignons
les bananes et les colliers
sortirent de sa poche un à un
Bonheur bonheur disaient-ils
Sa bouche est la sœur de ma bouche
et il fait bon marcher dans la rue des Anesses
BENJAMIN PÉRET.
P. 3
Lettre ouverte au Comité Lautréamont
Nous apprenons qu'un groupe d'amateurs, auquel se sont mêlés adroitement quelques critiques d'avant-garde, a pris l'initiative de célébrer le cinquantenaire de la mort d'Isidore Ducasse, comte de Lautréamont. La cérémonie anniversaire doit avoir lieu le 22 mars, place Vendôme. On a pu remarquer l'extrême discrétion avec laquelle nous avons laissé passer les fêtes du tricentenaire de l'esprit français. Les monuments, tant qu'ils ne commémorent qu'Apollinaire ou Jules Simon, ne requièrent pas autrement notre attention. Mais nos lecteurs, qui n'ont pas oublié les Poésies d'Isidore Ducasse parues ici même, comprendront que nous trouvions cette fois la plaisanterie douteuse. Non, nous ne permettrons pas que Lautréamont serve à remonter le niveau des morts pour la patrie (M.P.L.P.). Nous sommes prêts à tout pour empêcher cette mascarade.
Ce n'est pas à nous de faire observer que le prétexte même de cette petite fête est mal fondé, puisque le centenaire de Ducasse est échu l'année dernière.
Déclaration sur l'Affaire Ubu
Charles Chassé a déclaré que Jarry n'était pas l'auteur d'" UBU ROI ". Nous ne voulons pas plus discuter avec monsieur Chassé qu'avec messieurs Souday, Thérive, et autres critiques.
Pour nous, UBU ROI n'a rien à faire avec les comédies de Molière et de Shakespeare et les romans de Rabelais.
Il est fâcheux d'ailleurs qu'on ait profité du tricentenaire de l'un de ces messieurs pour nous infliger ce petit cours de littérature comparée.
Qui s'amuserait à prendre au sérieux un homme qui, comme le commandant Morin, a passé trente ans de sa vie dans l'armée ?
Devant l'évidence, nous nierons qu'UBU ROI soit l'œuvre de messieurs Chassé et Henri Morin.
Alfred Jarry a signé UBU ROI et en est mort. Jarry est un des hommes dont nous admirons sans réserve l'attitude, et nous défions qui que ce soit d'entamer sa personnalité par la contestation d'une de ses œuvres.
P. 4
Nous nous réjouissons qu'UBU ROI soit tenu pour une " c... ade " par les imbéciles. Nous n'avons pas souvent l'occasion de préférer un Paul Fort à un Binet-Valmer. Mais lorsqu'on nous met dans cette alternative à propos de Jarry, nous n'hésitons pas un seul instant.
Cette histoire ne comporte pas de morale.
Nous ajoutons, et il serait trop facile d'en faire la preuve à la manière de messieurs Morin et consorts, qu'UBU demeure un fait unique qui n'engage en aucune façon ce qui l'a suivi.
LA RÉDACTION.
Revue Rhénane, Neue Rundschau, N.R.F., etc.
L'analyse et la synthèse, je constate avec plaisir que le langage scientifique fait des ravages dans les cœurs de nos plus ingénus contemporains : Jacques Rivière rapporte aux Allemands le mot d'André Gide : " Je suis l'homme du second mouvement ", entre parenthèses c'est du joli, et fait un pont d'or à Marcel Proust, tandis que, passant, il ramène DADA à de justes proportions et tire une moralité de la guerre (il serait trop commode d'être absous de ridicule pour quelques précautions oratoires d'ailleurs cousues de fil blanc). Faut-il lui rappeler qu'il n'y a jamais eu de guerre ? Ce n'est que par un impudent abus que le portrait d'Arthur Rimbaud se trouve mêlé à tout ceci. Les possibilités de renouveau de la littérature d'analyse (sic), appuyées des noms de Georges Duhamel, Edmond Jaloux, Jean Schlumberger, Pierre Mac Orlan, constituent un tour de passe-passe où l'on reconnaît le charlatan. Il y a là de quoi rougir.
(Dans les pages d'annonce du numéro de janvier de la n.r.f., un manifeste commercial résume en termes grotesques les efforts désordonnés de cette revue et de ses filiales ; cela suffirait à donner la nausée).
Louis ARAGON.
Un faux médecin
Louis Pieniri, âgé de 67 ans, sous-officier de gendarmerie retraité, habitant avenue Laumière, se présentait dans les magasins tenus par des femmes seules. En marchandant quelque objet, il affirmait à son interlocutrice qu'elle avait mauvaise mine et, se prétendant médecin de l'Assistance publique, il l'invitait à se dévêtir, afin qu'il pût l'examiner.
Le faux médecin a été arrêté 31, rue de Montmorency et envoyé au Dépôt.
P. 5
Récit de trois Rêves
Sténographie par Mlle OLLA
Je passe le soir dans une rue déserte qui, autant que je peux m'en rendre compte aujourd'hui, doit être une rue du quartier des Grands-Augustins, quand mon attention est arrêtée par un écriteau au-dessus de la porte d'une maison. Cet écriteau, c'est : " ABRI " ou " A LOUER ", en tout cas quelque chose qui n'a plus cours, Intrigué, j'entre et je m'enfonce dans un couloir extrêmement sombre.
Un personnage, qui fait dans la suite du rêve figure de génie, vient à ma rencontre et me guide à travers un escalier que nous descendons tous deux et qui est très long.
Ce personnage, je le reconnais.
C'est un homme qui s'est occupé de me trouver une situation.
Aux murs de l'escalier je remarque un certain nombre de reliefs bizarres, que je suis amené à examiner de près, mon guide ne m'adressant pas la parole.
Il s'agit de moulages en plâtre, plus exactement de moulages de moustaches considérablement grossies.
Je reconnais, entre autres, les moustaches de Baudelaire, de Germain Nouveau et de Barbey d'Aurevilly.
Le génie me quitte sur la dernière marche et je me trouve dans une sorte de vaste hall divisé en trois parties.
Dans la première salle, de beaucoup la plus petite, où pénètre seulement le jour d'un soupirail incompréhensible, un jeune homme est assis à une table et compose des poèmes. Tout autour de lui, sur la table et par terre, sont répandus à profusion des manuscrits extrêmement sales.
Ce jeune homme ne m'est pas inconnu, c'est monsieur Georges Gabory.
La pièce voisine, elle aussi plus que sommairement meublée, est un peu mieux éclairée, quoique d'une façon tout à fait insuffisante.
Dans la même attitude que le premier personnage, mais m'inspirant, par contre, une sympathie réelle, je reconnais monsieur Pierre Reverdy.
Ces deux personnages n'ont pas paru me voir, et c'est seulement après m'être arrêté tristement derrière eux que je pénètre dans la troisième pièce.
Celle-ci est de beaucoup la plus grande, et les objets s'y trouvent un peu mieux en valeur : il y a un fauteuil inoccupé devant la table. Je comprends qu'il m'est destiné et je prends place devant le papier immaculé.
Je comprends le rôle que je suis appelé à remplir et je me mets instantanément en devoir de composer des poèmes. Mais, en m'abandonnant à la spontanéité la plus grande, je n'arrive à écrire sur le premier feuillet que ces mots : La lumière...
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Celui-ci aussitôt déchiré, sur le second feuillet : La lumière... et sur le troisième feuillet : La lumière...
II
J'étais assis dans le métropolitain en face d'une femme que je n'avais pas autrement remarquée, lorsqu'à l'arrêt du train elle se leva et dit en me regardant : " Vie végétative ". J'hésitai un instant, on était à la station Trocadéro, puis je me levai et me décidai à la suivre.
Au haut de l'escalier nous étions dans une immense prairie sur laquelle tombait un jour verdâtre, extrêmement dur, de fin d'après-midi.
La femme avançait dans la prairie sans se retourner et bientôt un personnage très inquiétant, d'allure athlétique et coiffé d'une casquette, vint à sa rencontre.
Cet homme se détachait d'une équipe de joueurs de foot-ball composée de trois personnages. Ils échangèrent quelques mots sans faire attention à moi, puis, la femme disparut, et je me trouvai dans la prairie occupé à regarder les joueurs qui avaient repris leur partie et à essayer d'attraper le ballon, mais... je n'y parvins qu'une fois.
III
Je me baignais avec un petit enfant au bord de la mer. Peu après je me trouvai sur la plage en compagnie d'un certain nombre de gens, dont les uns me sont connus et les autres inconnus, quand brusquement l'un des promeneurs fit remarquer, à une certaine distance, deux oiseaux qui volaient parallèlement, et qui pouvaient être des mouettes.
Quelqu'un eut aussitôt l'idée de tirer sur ces oiseaux (car nous portions tous des fusils) et l'on put croire que l'un d'eux avait été blessé.
Ils tombèrent en effet assez loin du rivage, et nous attendîmes quelque temps que la vague les apportât.
A mesure qu'ils avançaient, j'observai que ces animaux n'étaient nullement des oiseaux comme je l'avais cru tout d'abord, mais bien plutôt des sortes de vaches ou de chevaux.
L'animal qui n'était pas blessé soutenait l'autre avec beaucoup d'attendrissement. Quand ils furent à nos pieds, ce dernier expira.
La particularité la plus remarquable que présentait cet animal qui venait de mourir était la différenciation très curieuse de ses yeux.
L'un d'eux, en effet, était complétement terne et assez semblable à une coquille d'oursin, tandis que l'autre était merveilleusement coloré et brillant.
L'animal secourable avait depuis longtemps disparu. C'est alors que monsieur Lefébure qui, je ne sais pourquoi, se trouvait parmi nous, s'empara de l'œil phosphorescent et le prit pour monocle.
A ce propos, une personne de l'assistance jugea bon de raconter l'histoire suivante :
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Dernièrement, comme à son habitude, monsieur Paul Poiret dansait devant ses clientes, quand brusquement son monocle tomba par terre et se brisa.
Monsieur Paul Eluard, qui se trouvait là, eut l'amabilité de lui offrir le sien, mais celui-ci subit le même sort.
ANDRÉ BRETON.
Un Bon Mouvement : L'Ecole de Technique Poétique
Deux charmants garçons, deux jeunes poètes du plus grand avenir, Jules Romains et Georges Chennevière ont décidé de fonder à Paris une école de technique poétique. Nous ne sommes pas de ceux qui négligeons les bonnes volontés et qui tournons en ridicule les efforts des jeunes. Les Français, dont nous connaissons la pureté de mœurs, ont le grave défaut de ne pas s'intéresser aux inventions des jeunes gens et de laisser les étrangers en tirer parti à leur nez et à leur barbe. Notre rôle est de crier à haute et intelligible voix : " Voilà un invention bien française ; prenez garde. " Indiquons d'abord le programme :
A 8 heures moins le quart : réveil et toilette rapide. Petit déjeuner (thé, toasts et fruits confits.)
A 8 heures 1/2 : station à la pissotière.
A 9 heures très précises : cours d'assonnances comparées.
A 10 h. 5 : récréation.
A 10 h. 1/2 : lectures de nos meilleurs poètes : Jules Romains, Georges Chennevière, Jules Romains.
A 12 h. 1/2 : repas léger (œufs, viandes bouillies, pommes de terre, pas de dessert.)
A 1 h. : récréation.
A 2 h. cours : " La rime à travers les âges ".
A 3 h. cours : " Notre grand poète national : - La jeunesse de Jules Romains ".
A 4 h. " L'unanimisme, l'école de discipline et de vérité.
A 5 h. deuxième station à la pissotière.
A 5 h. 1/2. Qu'est-ce qu'un poète. - Lectures de morceaux de Georges Chennevière et Jules Romains.
A 7 h. dîner (pas de dessert).
A 8 h. récréation, lectures libres (les meilleurs livres sont à la disposition des élèves ; exemple : La Vie Unanime et les autres livres de Jules Romains).
A 9 h. : troisième et dernière station à la pissotière.
A 9 h. 1/2 : coucher.
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Méditons ce programme et admirons l'ordonnance de ces belles journées studieuses et vivantes.
Nous adresserons seulement un petit reproche (la perfection n'est, hélas, pas de ce monde) : nous estimons que les exercices physiques sont un peu négligés ; n'oublions pas le vieux proverbe latin : mens sana in corpore sano.
Et maintenant, grands-pères et pères de famille, il faut envoyer vos " surgeons " à cette école de technique poétique qui donnera d'excellents résultats. Nous ajouterons un dernier mot qui a d'ailleurs son importance. L'école offre des situations aux élèves sortants. Collaboration aux meilleures revues, correction des épreuves des nombreuses éditions de MM. Romains et Chennevière, courriers littéraires, prix Goncourt, etc., etc.
En terminant, qu'on nous permette de formuler un souhait et d'annoncer une bonne nouvelle. Notre revue ouvre une souscription pour gratifier de bourses les dadaïstes et néo-dadaïstes. Que tout le monde verse son obole. Ayons pitié de ces malheureux jeunes gens qui font les pitres en criant Dada (qu'on nous passe ce calembour que nous trouvons tout de même assez drôle, pourquoi pas Caca ?)
p. c. c. Philippe SOUPAULT.
Dernière heure.
Les dadaïstes ont répondu merde (c'est bien ce que je disais).
Au Cimetière de Levallois
En juin dernier, au cimetière de Levallois, Mlle Dufour plantait un rosier sur la tombe de sa mère. Soudain, elle recula d'épouvante. En retournant le terrain, elle avait mis à découvert une masse musculaire ayant la forme d'un cœur.
Dans ce cœur, découpé à la pointe, douze épingles fixaient une mèche de cheveux. Songeant à sa mère morte à l'hôpital Beaujon et dont le cadavre avait été autopsié, Mlle Dufour crut à une odieuse profanation et prévint le commissaire de police. Une enquête fut aussitôt ouverte. Le spécialiste des maladies cardiaques qu'on consulta tout d'abord, déclara que le cas ne relevait certainement pas de sa compétence. Enfin, vint un boucher, qui expertisa qu'il s'agissait bien d'un cœur, mais du cœur d'un jeune veau. Les épingles et la mèche de cheveux achevèrent de procurer la lumière. On était en présence d'une tentative d'envoûtement.
Une caoutchoutière de Levallois, Mlle Joséphine Barraud, abandonnée avec un enfant par un ami, s'était laissé persuader qu'en enterrant dans la tombe d'un inconnu un cœur de veau lardé des cheveux de l'infidèle, l'inconstant lui reviendrait, et le hasard avait voulut qu'elle tentât son expérience sur la tombe de Mme Dufour.
L'envoûtement n'étant plus de mode, a cessé d'être un crime. Mais n'y avait-il pas eu violation de sépulture ? Et, pour ce délit, Mlle Barraud comparaissait hier devant la onzième chambre.
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Combien avez-vous payé ce cœur de veau ? lui demanda le président Lemercier.
Trois francs, répondit Mlle Barraud.
Eh bien ! vous êtes assez punie, reprit le président, en prononçant l'acquittement de la prévenue.
***
Giorgio de Chirico
ET. QUID. AMABO : NISI. QUOD. RERUM. METAPHYSICA. EST ?
Giorgio de Chirico
Galops suspendus, décalages infimes des attitudes, rotations des boules de verre plus vite ou moins que la lumière qui les situe : la surprise exclue toute idée de représentation habituelle et fait hésiter à la lisière du merveilleux le mouvement, le geste ou la substance.
La résonnance des glaces - écho des vibrations multiples, transformation des roulements, tramways, déménagements, canons, troupes en marche - modifie étrangement les apparences. Une sinusoïde sur un verre fumé, une bande de carton perforée, plusieurs points noirs sur cinq lignes parallèles expriment le son d'un verre de cristal. Est-ce pour que, plus près de nous que le mirage, les plâtres des orthopédistes, révélés nus par les bandages, accouchent hors de leur enveloppe de Dieu grec, de l'atavisme poussé vers nous la main tendue ?
Singulière supposition.
Le harnachement des torses, des bras et des jambes en cuir et en nickel peut trouver dans sa danse même, ou dans l'arrêt qui la surprend, la matière de costumes coloriés et les gestes de s'en vêtir. Le rythme est anonyme.
Giorgio de Chirico ouvre des prisons nouvelles. Les trains enchaînés à la limite de l'horizon, esclaves du soleil - laminoir de cuivre plus dur que la lumière - halètent des sphères de fumée. Repos sous un vert-de-gris antique. Les cheminées hissent des tours plus rouges que l'absence des astres.
Les mains cherchent une crosse rassurante, s'évadent vers la statue unique et, mimétisme accueillant, le Brésil est ouvert comme les portes d'Athènes. Marches, ombrelles sur le sable, sauterelles : les hommes.
Prévue de toute éternité, le lotus et les acanthes en poudre dans l'arène, seule s'élève la galerie blanche plus ouverte que les ruines, image hésitante de tous les temples et dont le reflet subsiste sur les immeubles dévêtus de leurs panneaux réclames.
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La Ville triomphale il la plante d'étendards confiants. Dans un coin de la toile : le naïf tableau noir où des lignes de craie résument le cerveau de l'architecte.
Comme une réplique à la contemplation il dispose les Fruits : Ananas, gants, voitures de déménagements, boutons, balles de caoutchouc, bananes, poissons, bobines. Bulles spontanées, ou soufflées du monde, fabriquées indifféremment par la terre ou les usines, le bain métaphysique les colore de violet. L'inquiétude suscite de nouveaux sens : Evasion, voyage dans un ciel humoristique, tragique des natures mortes, désespoir devant trois gâteaux sur le bleu électrique et tournés de trois degrés dans le vide. Le ciel angulaire où chevauche l'ombre du roi fou, goutte à goutte dépose dans les berceaux indifférents des façades noires des boues de couleur. Il neige.
L'œuf d'un visage que découvre la nuit s'incline sur les mailles d'acier d'une robe et sur les pointillés de sang vert dont se nourrit la bouche du poète.
D'autre part, les mannequins d'acajou prennent des attitudes selon les doigts des peintres, les membres artificiels répètent nos gestes, les têtes de carton tournent pour les modistes. Une vie iccidentelle et intermittente nous donne la crainte d'imaginaires plus près de nous que le dragon, le sphinx ou l'hippocampe.
Les Muses inquiétantes, le Trouvère, le Revenant, Hector et Andromaque sont les personnages d'une nouvelle mythologie que l'optimisme et l'habitude nous avaient dérobés. Nous devons à de Chirico de les avoir exclus de notre indifférence.
Bien plus, métonymie de menuisier et d'ingénieur, il recule les visages dans l'absolu en les composant d'équerres, de règles et de pistolets. L'homme se révèle le mannequin qu'il s'est créé. Mais, apparition, s'il revient, les yeux fermés, avec ses jambes de colonne et son corps de méduse blanche, il porte comme des postiches les sourcils, la barbe et les moustaches.
En deça de tout domaine platonicien projection noire d'un bâton sur un angle, masque blême d'Apollon où hésite la lumière de sel d'une étoile de mer écrasée sur une flamme de bougie, jardins de papier peints, armure limitée aux courbes - déséquilibre plus vain que la cendre qui les colore - rouges soudain le bandeau sur le casque et le gant balancé dans les rues de la ville jeté par quel orage sur un peloton vert de laine, cheval primitif au-dessus d'un canon, plus léger d'ailes coupées et la crinière au pieux pêcheur de chevelures, poutres fuyantes et précises, laquées du reflet étiré des épées, livre sans ticket jaune avec un signet pourpre devant l'homme surgi - cervelle anthropomorphe et prête à P. 11 toutes les circonvolutions - le lyrisme immédiat comme la peur de l'ombre et le clignement d'yeux sur la ligne des paupières ravit les découvertes de l'agonie.
Cette expression troublante est aujourd'hui taxée d'incompréhensible par les peintres qui restent les mains crispées dans la couleur.
Nous plaignons ceux qui n'ont pas vu de dédoublements étranges derrière le dessin conventionnel d'une épure (la lumière en haut et à gauche, l'acier bleu, les ombres tournantes, les traits de force, etc...). Avec des leviers minces se meuvent les bras d'une porteuse d'eau, avec les marteaux le poing de l'homme, avec les foreuses les griffes de la taupe et cela en dehors de toute métaphore.
Nous ne craignons pas d'affirmer que les nouvelles perceptions que de Chirico invente sont exprimées au même titre que les guitares et que - s'il copie scrupuleusement les boîtes d'allumettes et les cartes de géographie - c'est pour affirmer un tragique quotidien plus inquiétant et plus multiple, sinon plus audacieux, que celui qu'indiquent les morceaux d'étiquettes et d'affiches collés sur les tableaux de Picasso.
Roger VITRAC.
Une lettre de Chirico
Rome, mercredi.
Mon bien cher ami,
Je suis très ému par tout ce que vous me dites dans votre bonne lettre. Il y avait longtemps que je travaillais sans espoir. Maintenant il faut avant tout que je vous éclaircisse un point : le point qui regarde ma peinture d'aujourd'hui. Je sais qu'en France (et même ici), il y a des gens qui disent que je fais du musée, que j'ai perdu ma voie, etc. ; c'était fatal et je m'y attendais : mais j'ai la conscience tranquille et suis plein de joie intérieure, car je sais que la valeur de ce que je fais aujourd'hui apparaîtra, tôt ou tard, même aux plus aveugles. La connaissance que j'ai faite de vous n'est-elle pas déjà un bon signe ? Le meilleur signe que j'aurais pu souhaiter ?
Et maintenant, mon cher ami, je vais vous parler de ma peinture actuelle. Vous devez avoir remarqué que depuis quelque temps, dans les arts, il y a quelque chose de changé ; ne parlons pas de néo-classicisme, de retour, etc. ; il y a des hommes, parmi lesquels vous êtes probablement aussi, qui, arrivés à une limite de leur art, se sont demandés : où allons-nous ? Ils ont senti le besoin d'un socle plus solide ; ils n'ont rien renié ; ce magnifique romantisme que nous avons créé, mon cher ami, ces rêves et ces visions qui nous troublaient et que, sans P. 12 contrôle, sans soupçons, nous avons jeté sur la toile ou sur le papier, tous ces mondes que nous avons peints, dessinés, écrits chantés, et qui sont votre poésie, celle d'Apollinaire et de quelques autres, mes peintures, celles de Picasso, de Derain et de quelques autres, ils sont toujours là, mon cher ami, et on n'a pas encore dit sur eux le dernier mot ; l'avenir les jugera bien mieux que ne font nos contemporains et nous pouvons dormir tranquilles. Mais une question, un problème me tourmente depuis bientôt trois ans : le problème du métier. C'est pour cela que je me suis mis à copier dans les musées ; qu'à Florence et à Rome j'ai passé des journées entières, en été et en hiver, auprès des maîtres des XIVe et XVe siècles italiens, les étudiant et les copiant ; je me suis enfoncé dans la lecture des anciens traités de peinture et j'ai vu, oui j'ai vu enfin, que des choses terribles se passent aujourd'hui en peinture, et que si les peintres continuent sur cette voie, nous allons vers la fin. D'abord j'ai découvert (je dis découvert parce que je suis le seul à le dire) que la maladie chronique et mortelle de la peinture aujourd'hui est l'huile, l'huile qu'on croit la base de toute bonne peinture ; Antonello de Messine qui, d'après l'histoire, aurait apporté en Italie, des Flandres, le secret de la peinture à l'huile, n'a jamais fait cela ; ce malentendu se base sur le fait que les Flamands, surtout les frères Van Eyck, usaient pour repasser avec des glacis sur leur tempera, d'émulsions où l'huile de lin ou de noix entrait en petite partie ; mais la base de leur peinture était la tempera ou détrempe à laquelle ils mêlaient quelquefois des huiles et surtout des résines ou, d'autres matières encore, comme le miel, la caséine, le lait de figuier, etc. ; ainsi ont peint, sans aucun doute, Dürer, Holbein, Raphaël, Pietro Perugino, et je crois que même Rubens et Titien n'ont jamais peint à l'huile comme on l'entend aujourd'hui. Lorsque j'eus compris cela, je me mis avec la patience d'un alchimiste à filtrer mes vernis, à broyer mes couleurs, à préparer mes toiles et mes planches, et je vis la différence énorme qui en résultait : le mystère de la couleur, la lumière, l'éclat, toute la magie de la peinture (qui, soit dit sans vous fâcher, vous cher ami et grand poète) est, selon moi, l'art le plus compliqué et le plus magique qui soit, toutes ces vertus de la peinture, dis-je, augmentaient prodigieusement comme éclairées d'une lumière nouvelle ; et je pensais avec mélancolie aux impressionnistes, aux Monet, aux Sisley, aux Pissaro, à tous les peintres qui ont cru pouvoir résoudre avec leur technique le problème de la lumière, tandis que sur leur palette ils portaient la source même des ténèbres ! Et j'ai peint aussi ; je peins plus lentement, c'est vrai, mais combien mieux ! J'ai fait dernièrement un portrait par moi-même, dont je vous enverrai la photo ; c'est une chose qui pourrait figurer au Louvre, je ne le dis pas pour me vanter, mais parce que je le pense. Excusez ma longue P. 13 péroraison de peintre, et aussi mon mauvais français de barbare péninsulaire. Pour aujourd'hui, je ne veux pas vous fatiguer davantage. D'ici quelques jours je vous enverrai les photos, et alors je vous écrirai longuement ; je vous parlerai de votre poésie, de mes projets et de ma venue à Paris que j'espère pouvoir réaliser ce printemps.
Encore merci ; je vous embrasse.
Votre ami, G. de CHIRICO.
Chaplin : == The Kid
Nos plus éminents journalistes, nos meilleurs " cinégraphistes " criaient tellement fort : " Ce film est un chef-d'œuvre de pitié, d'humour, de gaieté, d'humanité, etc... " que nous nous attendions à la plus authentique ordure.
Nous fûmes surpris : The Kid n'était tout de même pas aussi mauvais que les louanges des individus ci-dessus dénommés pouvaient nous le faire croire.
Charlie Chaplin a sans doute tort de se prendre au sérieux, mais il reste toujours au coin de ses lèvres cette fleur d'insouciance.
Notre ami semble jouer avec des bulles légères qui lui éclatent au nez dans un fracas de vaisselle cassée, de jouets mécaniques et d'accidents de chemins de fer. Parfois il joue avec des accidents de chemins de fer et d'hommes et ce sont, nous nous en apercevons plus tard, de simples bulles qu'un souffle éloigne pour longtemps.
Il ne faut pas cependant se laisser aller à l'indulgence. La sentimentalité fait son apparition dans ce film. Cela nous en promet de belles et nous allons peut être entendre nos bons journalistes nous annoncer de nouveaux chef-d'œuvres de pitié ect.., (voir plus haut.)
Nous pouvons difficilement nous en étonner puisque nous avons appris avec la plus profonde tristesse que Charlie Chaplin avait visité, lors de son passage à Paris, le quartier latin accompagné de MM. Jacques Copeau et Jules Romains.
Est-ce qu'un jour on ne nous annoncera pas que Charlie Chaplin suit les cours de " l'école de Poésie " de maître Farigoul et autres Chennevière ou bien qu'il est incorporé dans la célèbre compagnie du Vieux-Colombier ? Nous pouvons, vous dis-je, nous attendre à tout. Il ne nous restera bien-tôt plus que les bombes, tendres œillets, ou l'argent, maîtresse des maîtresses, mère des souvenirs.
Jackie Coogan, sympathique enfant, ne vous affolez pas, vous êtes simplement un bon élève.
Philippe SOUPAULT.
P. 14
Scène relative
Secouer les tristesses vaincues
de délicieuses floraisons
un chemin de fer à l'horizon
charge nos pensées perdues
Accourez accourez tous
mon cœur cuit dans du bouillon
Regardez ces fibres qui poussent
Ce sont des dames en pamoison
Mystère on ne voit pas de racines
Je vous donne dix jours pour réfléchir
sur ce qui fait sourire
ce monde et la joie qu'il rumine
Pendant qu'un charlatan finit de déclamer ces paroles, une femme aveugle passe en chantant
Fin de saison clavicule
des idées du pauvre passant
Chute de la nuit et du temps
demain on récapitule
Zinc
Tu bats les tapis
où sont tous les yeux
enfouis dans l'hiver
bêtes à bon Dieu
ou sont les poussières
P. 15
L'Orient ne nuit
aux plus belles choses
N'étends pas les bras
il y a des rails
où courent nos esprits
La fenêtre s'ouvre
comme un Dieu rose
Tu songes au présent
quand vient l'avenir
Qui peut te dire ose
Car nos voix brisent
les mots vraiments pires
puisqu'il n'y a rien
autre que nous-mêmes
Jacques BARON
J'ai vu : l'homme qui se dégonfle, à l'Olympia
Dans la cour lourde de fatigue, deux hommes dorment - des pastilles d'heures difficiles au cadran des littératures humaines. Une charrette, des planches, des meubles sentent le bois jeune et la résine. Pourquoi sommes-nous assis dans un fauteuil à regarder comme il descend du sommeil dans la mort. Nous sortons toujours par l'escalier de service. La mort est couleur de plomb, ses moustaches tombent comme les ailes des oiseaux mondains. Les bras tombent. La poitrine est lourde. Les muscles des jambes sont en gélatine. Tout est gonflé d'une haleine condamnée. Et cette masse d'étoffe et de chair habituée se visse en spirale dans le centre de gravitation qui l'appelle. Son camarade est fort. Il ne comprend pas. Il essaye de le placer sur une chaise. Pour ne plus être à côté d'un cadavre. Il ne comprend rien. L'autre tombe toujours. Il s'entête. Devient furieux. Ne voit que la tranquillité de l'équilibre. Cela dure comme le cours normal d'une maladie. Ils sont assis l'un à côté de l'autre sur des chaises et dorment. Le soleil. Ils se réveillent. L'homme qui se dégonfle le premier. Et se gratte la tête où fourmillent des nervosités animales.
Tristan TZARA.
P. 16
André Gide nous parle de ses Morceaux Choisis
Je n'ai jamais été un familier d'André Gide, ce qui sans doute me permet de le rencontrer quelquefois et d'échanger avec lui des propos un peu moins insignifiants qu'il ne voudrait. A vrai dire, quoique la légèreté ne soit pas mon fort, l'auteur des " Caves du Vatican " (ces périphrases lui conviennent) m'amuse, depuis longtemps, beaucoup plus qu'il ne m'alarme. Plus j'irai, plus sans doute j'aurai du goût pour un homme qui se confond. Celui-ci est, à notre époque, un critérium tout trouvé : sa superficialité, ses coquetteries, ses prétentions, que balancent quelques bonnes qualités de second ordre, me renseignent aussi formellement sur ceux qu'il enthousiasme que sur ceux qu'il exaspère.
La scène se passe un de ces derniers jours, à l'heure du thé, dans une boulangerie de la rue de Grenelle.
GIDE : - Enfin qu'attendez-vous de moi ? Mon anthologie, qui vient de paraître à la revue, ne vous a-t-elle pas complètement satisfait ?
MOI : - Excusez-moi, Monsieur, je ne l'ai pas lue.
GIDE : - La voici. Mais ne me demandez pas d'y mettre une dédicace. Ce serait avec plaisir, mais je n'en ai mis à personne.
MOI : - Vous avez, je crois, fait paraître un ouvrage de même genre dans la Bibliothèque de l'Adolescence.
GIDE : - Si vous saviez quelle partie je joue. C'est que je ne suis pas un poète ! Les poètes ont trop beau jeu. Mais moi, de combien de réflexions ne fais-je pas précéder le déplacement d'un seul de mes pions ! J'ai encore beaucoup à écrire mais je connais mon but et le plan même de tous mes volumes est arrêté. Soyez certain que j'avance, avec lenteur, soit ; d'autant plus avec volupté.
MOI : - Ne craignez-vous pas qu'on vous tienne faible compte de ces calculs ? Il s'agit de tout autre chose. Peut-être, en ne voulant vous priver d'aucune chance, perdrez-vous la partie de toute façon.
GIDE : - Je ne dois de comptes qu'après ma mort. Et que mimporte, puisque j'ai acquis la certitude que je suis l'homme qui aura le plus d'influence dans cinquante ans !
MOI : - Alors pourquoi vous préoccuper de sauver les apparences ? On sait maintenant quelle légende il vous plaît qu'on accrédite autour de vous : votre inquiétude, votre horreur des dogmes, et ce côté décevant. Les plus maladroits s'y essayent.
P. 17
GIDE : - Mais je suis au contraire plus calomnié que jamais. Dans la " Revue Universelle " M. Henri Massis déverse des ordures sur moi. Croyez-moi, Breton, tout viendra à son heure : en lisant mes Morceaux choisis, vous verrez que j'ai surtout pensé à vous et à vos amis.
MOI : - Une préférence ne nous suffit pas. Il n'est pas un de nous qui ne donnerait tous vos volumes pour vous voir fixer cette petite lueur que vous avez seulement fait apparaître une fois ou deux, j'entends dans les regards de Lafcadio et d'" Un Allemand ". Est-il bien nécessaire que vous vous consacriez à autre chose ?
GIDE : - Ce que vous me dites est bien étrange, mais c'est de la faillite de l'humanité toute entière que vous avez le sentiment. Je vous comprends mieux que vous ne croyez et je vous plains. Comme nous le disions l'autre jour avec Paul Valéry : " Que peut un homme ? " et il ajoutait : " Vous souvenez-vous de l'admirable question de Cervantès : " Comment cacher un homme ? "
ANDRÉ BRETON.
Benjamin Péret : Le Passager du Transatlantique
Je secoue aujourd'hui ma paresse.
Le Passager du Transatlantique par Benjamin Péret, a paru au mois de juillet 1921 et je suis le premier qui veut bien lui consacrer quelques lignes.
J'avoue que je suis un ignoble individu de ne pas l'avoir fait plus tôt, mais j'ai une excuse : l'activité de certains personnages louches est tellement écœurante que je ne pouvais que vomir.
Je sais bien que personne n'a parlé et ne parlera des petites crottes de biques sculptées de Radiguet que Cocteau s'efforce de nous faire prendre pour du crottin d'éléphant, mais j'espérais tout de même que l'imbécilité de mes chers contemporains ne les contraindrait pas à jeter dans le même sac de silence ce livre de Péret et les raclures de Radiguet.
Je n'aime pas beaucoup faire le maître d'école, mais je dois déclarer que ce Passager du Transatlantique est un livre remarquable, un des plus remarquables qui aient paru depuis dix ans.
Je conseille à tous mes jeunes amis de faire des économies et de se procurer ce volume. Ils n'auront perdu ni leur temps ni leur argent.
Pourquoi, hélas, Binet-Valmer salit-il tous les mots qui me permettraient de louer ce livre et d'en dire tout le bien que je pense ? L'aritméthique m'aidera cette fois et j'écrirai : Le Passager du Transatlantique : 19 sur 20.
P. 18
Il ne s'agit plus d'esthétique ou de versification, il ne s'agit plus de chronologie ou de mimétisme, de parenté ou de filiation. Il y a ce livre qui est sur ma table et que je vais ouvrir. Je copie ce poème :
PONT AUX CYGNES
Quel âge quelle heure quel temps
quel âge Merci c'est un secret
quelle heure Elles sont toutes bonnes
meilleures que les prâlines du docteur Docteur
quel temps celui des oreilles chaudes
des mains chaudes
du cœur chaud
ainsi que du reste
Je voudrais copier ainsi beaucoup de poèmes et répéter : c'est très bien.
Je ne parle pas de notre cher Benjamin qui vit tranquillement à Nantes.
Lui aussi est très sympathique et je lui envoie mon amitié avec un gentil signe de la main.
Philippe SOUPAULT.
Mae Murray
On voit déjà en quoi les jeunes gens dans dix ans nous reprocheront de nous être laissé épater par le cinéma. Le dernier refuge de la sentimentalité. Les femmes et les voyages, quels prétextes ! Les stupéfiants se passent de justification. Le miracle inouï, ce sont ces femmes qui ne parlent pas. Tous, au moins une fois, nous serons leur victime.
Les drames de la coquetterie. Son petit rire qu'on ne gouvernera jamais. ses derniers mensonges, ses prochains mensonges, ses robes, ses enfantillages exaspérants, ses ultimatum à propos d'un gant ou d'une promenade, tout ce qu'on ne sait pas, la terreur et le désir d'une inévitable rupture, sa tendresse au moment où on ne l'espère plus, son incorrigible gaité, et le souvenir de ce long corps trop agile, d'une récompense extravagante, d'un vice, je suis amoureux de Maë Murray.
Jacques RIGAUT.
Charles Nordmann : Einstein et l'Univers
Il y a un nouveau Jésus-Christ qui est Einstein. Dada aussi est un nouveau Jésus-Christ, mais devant la croix, non dessus. Quant à Einstein, que faut-il dire ? Lui ou un autre. On lui prête trop. Et Dada aussi lui prête trop et l'aime trop. Le principe de causalité bousculé, quelle ivresse. Derrière cette petite boulette d'opium aux effets ad libitum qu'y a-t-il ? Une nouvelle vérité scientifique. La vérité de non-vérité. Le ron-ron continue. Mais cette fois sympathique. On l'aime, nous l'aimons, je l'aime. On aime avoir dans sa famille un cousin polytechnicien : Vous voyez bien que je sais compter.
G. RIBEMONT-DESSAIGNES.
P. 19
Interview du Professeur Freud à Vienne
Aux jeunes gens et aux esprits romanesques qui, parce que la mode est cet hiver à la psychanalyse, ont besoin de se figurer une des agences les plus prospères du rastaquouérisme moderne, le cabinet du Professeur Freud avec des appareils à transformer les lapins en chapeaux et le déterminisme bleu pour tout buvard, je ne suis pas fâché d'apprendre que le plus grand psychologue de ce temps habite une maison de médiocre apparence dans un quartier perdu de Vienne. " Cher Monsieur, m'avait-il écrit, n'ayant que très peu de temps libre dans ces jours, je vous prie de venir me voir Lundi (demain 10) à 3 h. d'après-midi dans ma consultation. Votre très dévoué, Freud. "
Une modeste plaque à l'entrée, Pr. Freud, 2-4, une servante qui n'est pas spécialement jolie, un salon d'attente aux murs décorés de quatre gravures faiblement allégoriques : L'Eau, Le Feu, la Terre et l'Air, et d'une photographie représentant le maître au milieu de ses collaborateurs, une dizaine de consultants de la sorte la plus vulgaire, une seule fois, après le coup de sonnette, quelques cris à la cantonade : pas de quoi alimenter le plus infime reportage. Cela jusqu'à ce que la fameuse porte capitonnée s'entr'ouvre pour moi. Je me trouve en présence d'un petit vieillard sans allure, qui reçoit dans son pauvre cabinet de médecin de quartier. Ah ! il n'aime pas beaucoup la France, restée seule indifférente à ses travaux. Il me montre cependant avec fierte une brochure qui vient de paraître à Genève et n'est autre chose que la première traduction française de cinq de ses leçons. J'essaie de le faire parler en jetant dans la conversation les noms de Charcot, de Babinski, mais, soit que je fasse appel à des souvenirs trop lointains, soit qu'il se tienne avec un inconnu sur un pied de réticence prudente, je ne tire de lui que des généralités comme : " Votre lettre, la plus touchante que j'aie reçue de ma vie " ou " Heureusement, nous comptons beaucoup sur la jeunesse ".
André BRETON.
P. 20
Note sur le Comte de Lautréamont ou le Cri
Mal d'or or de douleur
Mal d'or l'or a brisé la mort
Sa folie ne fut pas belle - c'est pourquoi elle vit encore. Qui ose combattre une réalité parce qu'on la sert sous forme de reproche ? VOIR : nécessité d'un déclic cérébral.
Ceux dont l'incertitude s'étale en prétentions et l'orgueil monte sous forme de salive cérébrale, ceux pour qui les marécages et l'excrément ont déterminé la règle de pitié philosophique, verront un jour ou l'autre l'incommensurable malédiction déchirer leurs muscles sales et faibles.
Le comte de Lautréamont a dépassé le point de tengence qui sépare création de folie. Pour lui la création est déjà médiocrité. De l'autre côté c'est l'inarticulable solennité. Les frontières de la sagesse sont inexplorées. L'extase les dévore - sans hiérarchie et sans cruauté.
La douleur lui glace les méninges, lui broie le cristal de sang, conduit sur un étrange canal de regrets pathétiques le désordre des doublures des vieux bateaux des vieux manteaux. Imaginaire ou exagérée, la douleur boit le silence, accompagne la force suraigüe qui tente constamment à se résoudre dans le délirium tremens féérique et universel.
La liberté de ses facultés, que rien ne lie, qu'il tourne de tous les côtés et surtout envers lui-même, la force de s'abaisser, de démolir, de s'accrocher à toutes les tares, avec une sincérité beaucoup trop intime pour nous intéresser, est la plus haute attitude humaine - parce que transformée en action, elle devrait aboutir à l'anéantissement de cet étrange mélange d'os de farine et de végétations : l'humanité. L'esprit de cet homme négatif, prêt à chaque instant à se laisser tuer par le carrousel du vent et piétiner par la pluie des météores, dépasse l'hystérie douceâtre de Jésus et d'autres moulins à vent infatigables, installés dans les somptueux appartements de l'histoire.
N'aimez pas si vous voulez mourir tranquillement.
Mal d'or or de douleur
Mal d'or l'or a brisé la mort
par son éclat et la musique des grenouilles de zéphyr.
Tristan TZARA.
P. 21
L'Esprit Nouveau
Le lundi seize janvier à cinq heures dix, Louis Aragon remontait la rue Bonaparte quand il vit venir en sens inverse une jeune femme vêtue d'un costume tailleur à carreaux beige et brun et coiffée d'une toque de la même étoffe que sa robe. Elle semblait avoir extrêmement froid, plus froid qu'il ne faisait en réalité. A la faveur de la lumière de la librairie Coq, Aragon constata qu'elle était d'une beauté peu commune et qu'en particulier ses yeux étaient immenses. Il eut envie de l'arrêter, mais se rappela qu'il n'avait sur lui que deux francs vingt. Il y pensait encore quand il fut rejoint par André Breton au café des Deux Magots. " Je viens de faire une rencontre étonnante, lui dit ce dernier à peine assis. En remontant la rue Bonaparte j'ai dépassé une jeune fille qui regardait à chaque instant derrière elle, bien que vraisemblablement elle n'attendît personne. Un peu avant la rue Jacob, elle fit mine de s'intéresser à la devanture du magasin d'estampes, de manière à ce qu'un passant incroyable, tout-à-fait immonde, qui l'avait remarquée lui adressât la parole. Ils firent ensemble quelques pas et s'arrêtèrent pour deviser, tandis que je stationnais à quelque distance. Bientôt ils se séparèrent et la jeune fille me parut encore plus désorientée. Elle tourna un moment sur elle-même puis, avisant un personnage d'aspect subalterne qui traversait la rue, elle alla brusquement à lui. Quelques secondes plus tard, ils se jetaient dans l'autobus " Clichy-Odéon ". Je n'eus pas le temps de les rejoindre. J'observai qu'ils restaient sur la plate-forme cependant qu'un peu plus haut dans la rue, le gros homme de tout-à-l'heure demeurait immobile, comme en proie à un regret. " Aragon, comme nous l'avons dit, semblait surtout avoir été frappé de la beauté de l'inconnue, Breton de sa mise très correcte, quoique imperceptiblement excentrique, de ce côté tellement " jeune fille qui sort d'un cours " avec on ne sait quoi dans le maintien d'extraordinairement perdu. Etait-elle sous l'effet d'un stupéfiant ? Venait-il de se produire une catastrophe dans sa vie ? Aragon et Breton avaient beaucoup de mal à comprendre l'intérêt passionné qu'ils portaient tous deux à cette aventure manquée. Le second était persuadé que quoi qu'il eut vu la jeune fille partir en autobus, elle était encore au même endroit de la rue Bonaparte. Il voulut en avoir le cœur net. En sortant il rencontra André Derain qui lui demanda de l'attendre aux Deux Magots. " Je reviens les mains vides ". disait-il à Aragon quelques instants après. Ni l'un ni l'autre ne pouvait prendre son parti de cette déconvenue et, quand Derain arriva, ils ne purent s'empêcher de lui confier le sujet de leur émotion. Ils n'avaient pas plus tôt commencé à le faire que Derain les interrompit : " Un P. 22 costume à carreaux, s'écria-t-il, mais je viens de la rencontrer devant la grille de Saint-Germain-des-Prés ; elle était avec un nègre. Celui-ci riait et je lui ai même entendu dire textuellement : " Il faudra bien changer. " Auparavant j'avais vu de loin cette femme arrêter d'autres gens et j'avais attendu un instant qu'elle vînt aussi me parler. Je suis certain de ne l'avoir jamais vue par ici, et pourtant je connais toutes les filles du quartier. "
A six heures, Louis Aragon et André Breton, ne pouvant renoncer à connaître le mot de l'énigme, explorèrent une partie du sixième arrondissement : mais en vain.
Tristan Tzara : Cinéma calendrier du cœur abstrait
Il y a en ce moment dans la presse une nouvelle levée de boucliers. C'est sans doute pour saluer la naissance de ce livre dont le luxe désuet en inspirera aux générations présentes et futures.
Tout peut se chanter sur l'air de " Mon homme ". Mes poèmes, mes chers petits poèmes si loin de tout, vous êtes des astres de verres aux parfums de couleur, je suis seul près de vous et j'écoute.
Oiseaux des polygones tubes tapis de Paris rouge comme les lunes des serpents de deux sons brulûres tendres et féroces comme les papillons automobiles saintes, vieux bouchers du lundi. L'espérance qui court comme l'eau comme le feu se feuillète de trois à quatre près d'une gazelle de dentelle.
Mon vieux Tzara il manque dans votre livre votre rire inoubliable que j'aime tant, je l'entends encore et vous êtes là vous êtes loin.
Mon vieux Tzara j'aime votre livre comme un œuf, mais je n'ai jamais pu vous appeler Tristan.
Philippe SOUPAULT.
Johan Bojer : Le Caméléon
L'œil du caméléon suit d'un mouvement oblique la physionomie du spectateur étonné devant l'étrange couleur apparue. Johan Bojer est peut-être un idiot, mais son Caméléon a tant de charme qu'on oublie de se poser la question. Une couleur, une autre couleur. Une couleur nouvelle. Mais ceci, non. Il faut se borner à se parer de lie-de-vin ou de vert-de-gris, et tromper sur sa couleur véritable. Et la prison sans murs dans laquelle est enfermée par nature le pauvre Andreas qui va jusqu'à simuler P. 23 le simulateur professionnel mêne toujours à la prison pourvue par les lois. Et la prison qui n'a que quatre murs finit dans son exiguïté par rendre artiste le Caméléon né : il a épuisé tous les rôles que les hommes prennent au sérieux et qui finissent si mal. Il lui reste à prendre pour lui-même l'attitude d'un roi souverain de trois sphères de l'espace. Un détenu seul peut se permettre ce luxe ; et avec lui tout patenté des beaux-arts.
G. RIBEMONT-DESSAIGNES.
Entrevue avec Maître de Moro-Giafferi
" Allo ! l'Instruction publique ? Je voudrais parler à Bérard... Maître de Moro-Giafferi... Comment ? c'est bien ennuyeux. Veuillez insister... Ah ! c'est toi. As-tu vu l'exposition *** au Cercle interallié ? Alors, mon cher, j'ai justement une demi-heure à t'accorder cet après-midi ; extraordinaire, mon cher, extraordinaire. Une chose à mettre à côté de Goya, de Tiépolo. Et un coloriste. " Un petit homme à la moustache tombante, aux yeux fatigués, vêtu d'une jaquette déformée et coiffé d'un chapeau melon aux larges bords quitte la cabine téléphonique et vient retrouver son verre de turin sec à la table voisine de celle qu'occupent André Breton et Philippe Soupault au café Francis, place de l'Alma.
Maître de Moro-Giafferi, car c'était bien lui, s'installa en remuant les jambes ; il tira à petits coups sur une cigarette presque éteinte et frisa distraitement sa moustache. Brusquement, il saisit des journaux et commença à lire un article des Potins de Paris qui lui était consacré. Il accompagnait sa lecture de petits gloussements, de sourires et de haussements d'épaules. André Breton et Philippe Soupault le regardaient et allaient lui adresser la parole pour l'entretenir du Congrès de Paris quand Me de Moro-Giafferi s'écria : " Pardon, Messieurs, ces journaux sont-ils à vous ou à moi ? "
Philippe Soupault qui se trouvait placé à côté du député de la Corse répondit avec son amabilité bien connue : " Maître, ils sont à moi, mais je les mets très volontiers à votre disposition. "
" Vous êtes bien gracieux, dit Me de Moro en s'inclinant. Si vous voulez consulter les miens... "
" Je profite de votre permission, répliqua Philippe Soupault avec un sourire, car nous sommes désireux, mon ami et moi, de lire l'article qui vous concerne.
Me de Moro-Giafferi très aimablement nous tendit les Potins de Paris en ajoutant quelques mots incompréhensibles qui signifiaient sans doute : P. 24 " Je suis très flatté que vous m'ayez reconnu. " Il n'en semblait pas autrement étonné. L'article était manifestement un éreintement et poliment, en remerciant Me de Moro, nous lui en fîmes la remarque. Il n'attendait que cette occasion : " C'est juste, dit-il, mais le plus drôle est qu'un rédacteur de cette feuille m'avait écrit, il y a quelques mois, en me priant de le faire citer au procès Landru. Il avait, prétendait-il, rencontré une des femmes de Landru dans un bordel. J'ai vérifié moi-même ce détail qui, naturellement, était faux. Je n'ai pas cru devoir faire citer ce journaliste, d'où cette petite vengeance. " Me de Moro-Giafferi nous entretint ensuite avec abandon de sa plaidoirie, des réformes à apporter dans l'institution du jury, et tout naturellement, il fut amené à parler de Landru.
" J'ai travaillé l'affaire pendant plusieurs longs mois et j'ai vécu près de cet homme. Je ne crois pas qu'il soit possible de rencontrer dans les annales judiciaires un accusé sur lequel pèsent autant de présomptions et si peu de preuves. Landru est soit un épileptique, car pour être digue-digue il n'est pas nécessaire de se cogner la tête à tous les coins de rue. soit l'homme le plus insensible que j'ai rencontré de ma vie. Après tout, que voulez-vous ? moi, je ne sais rien de cette histoire : toutes ces femmes qui disparaissent, c'est bien extraordinaire. On a raconté beaucoup d'histoires qui presque toutes sont fausses et je déclare qu'à la fin de ma plaidoirie je n'ai pas pleuré, comme on me l'a fait faire. Il est impossible de prendre la défense de quelqu'un sans se passionner et j'avoue avoir ressenti en terminant le petit coup au cœur. Eh bien, immédiatement après sa condamnation, je suis allé voir Landru dans sa cellule. C'est toujours à ce moment que nous essayons de connaître la vérité. Je l'ai cuisiné pendant deux heures. (Je m'excuse de vous dévoiler les dessous du métier, mais j'ai beaucoup de plaisir à causer avec vous, il y a si longtemps que je ne suis pas entré dans un café). Je lui ai fait remardonc que j'ai cuisiné Landru pendant deux heures. Je lui ai fait remarquer combien sa situation était ennuyeuse et tragique pour sa famille. Je lui parlai longuement d'une de ses filles, le seul être pour lequel il paraisse témoigner une sincère affection. Il ne me répondit rien. A bout d'arguments je crus bon, ce n'est guère à répéter, de lui décrire une exécution capitale avec toute l'éloquence dont je suis capable. Quand j'eus terminé, Landru me regarda et dit : " Mais savez-vous que ce que vous me racontez là, c'est très intéressant ".
Maître de Moro-Giafferi acheva son turin, appela le garçon et lui déclara : " Je voudrais payer. " Puis il reprit ses journaux. Il mit dans ses poches le Petit Parisien, le Journal et les Potins de Paris, mais déchira avec énergie l'Action Française, en froissa les morceaux et jeta le tout sous la banquette : " Je ne tiens pas à leur faire de la propagande ", dit-il en se levant.
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