MÉLUSINE

Immortelle maladie

1

Sur la colline qui n’était inspirée que par les lèvres peintes
les yeux blancs s’ouvrent à la lumière de la fête
et la respiration va mourir de sa belle mort
On dirait qu’une main
se pose sur l’autre versant de la colline
et que les hommes crient
C’était du ciel de Dieu que tombaient les paroles absurdes
Maintenant partons pour la maison des algues
où nous verrons les éléments couverts par leur ombre
s’avancer comme des criminels
pour détruire le passager de demain
ô mon amie ma chère peur

2

Où est-il
Parmi les étoiles accroupies
ou les minéraux inconnus
qui flambent dans les corolles des fleurs fatales
Si je rêvais je pourrais répondre
Il descend du bec de la colombe
ou bien
Il monte les escaliers de neige qui conduisent aux roches soupirantes
les grands escaliers bénévoles
où vivent les poètes en caoutchouc

3

Le doigt dans l’eau
les chanteurs aimant chanter
ont l’air d’une fleur fanée
Fleur fanée CŒUR aimé
dit l’autre
Mais toi poussière de charbon
tu n’es pas aimée
et tu t’envoles vers le soleil
Nous grandissons dans le bruit des coups de pioche
Que fait-on à la terre
Le supplice commence avec le passage de la jeune fille aux
oranges
qui passe près de nous tous
aspire l’air à pleins poumons et pleure
parce qu’il faut pleurer sans mesure
Pleure jeune fille aux oranges
tu connaîtras l’amour des cordes de pendu
tu connaîtras l’amour et la caresse des plumes

4

Courir sur un miroir comme un aveugle
et chanter dans l’oreille des dieux
voilà mes désirs aujourd’hui
Mais le vent aura chassé les êtres de leur élément naturel
avant que je passe dans l’avenue plantée de moribonds
qu’un souffle salé ferait renaître
et qu’un cri de paon ferait mourir.
Si je passais ils resteraient éternellement moribonds
c’est pourquoi il faut que je défile devant eux
avec mon ombre
Faute de quoi le meilleur de moi-même
ne sera plus que l’insaisissable soupir
d’un animal que j’ai rêvé dans ma jeunesse

5

Montrez-moi le savant amoureux de la femme-cyclope
que j’en fasse mon égal
Après pourra venir l’ère des fleurs galantes
des squelettes patriotiques
et des catastrophes sans importance
je m’en fous
J’irai près des pyramides
qui ne sont que des colliers de martyrs
destinés à disparaître avec leurs propriétaires
et le souvenir de leurs ridicules
et je danserai devant ces fameuses pyramides
jusqu’à ce qu’elles disparaissent

6

Il s’agit de la pluie qui a mouillé les os les plus rebelles
La pluie des os atteindra un jour les oreilles nocturnes
et l’on saura ainsi que se prépare la mue des fruits
leur départ sur les ailes des monstres aux yeux de quartz
qui pleurent devant le soleil levant
Les poissons de chaleur s’envoleront
à l’équinoxe d’automne
et s’arrêteront à toutes les villes enchantées par les nombres
élevés
les fractions infinitésimales
et les regards des femmes qu’enveloppent les fleuves débordants

Pour moi je demande que le ciel s’en aille avec les nuages
avant que je devienne tout à fait imbécile